Un siècle au service de la collectivité
68 Chapitre 3 considérer avec quelque mélancolie nos mo- destes maisons de bois, si primitives encore et qui ont pourtant de si beaux états de service ». Des expériences antérieures similaires n’avaient pas rencontré un tel succès. Le rapport annuel de DSR 1921-1922 16 déplore une fréquentation moindre des cheminots dans un foyer ouvert à leur intention à Renens (VD) : «Avouons franche- ment que nous sommes déçus […]. Les employés des CFF, à qui nous songions en premier lieu, semblent ignorer le chemin. Il s’agira d’infuser de la vie à cette maison endormie. Nous nous y efforcerons. » L’écart entre les constats des deux com- mentaires ne s’explique pas que par le nombre d’années qui les sépare. Le fait d’être associés directement avec l’entreprise est sans nul doute la raison du succès. EN FAVEUR DES JEUNES ET DES CHÔMEURS Afin de poursuivre leur mission sociale et morale, les dirigeants de DSR cherchèrent encore d’autres terrains d’action. Durant longtemps, l’enseigne- ment de Louis-Lucien Rochat resta la référence principale et les membres du DSR s’inscrivirent dans la continuité de sa ligne de conduite. Ils ouvrirent par conséquent des établissements pour « lutter contre les auberges ». 20 Au centre-ville de Lausanne, en face de l’Université, DSR ouvrit en automne 1919 déjà un «baraquement». Le but était de «créer unemaison hospitalière et chaude, surtout durant les soirées d’hiver, et de faire concurrence à des attractions trop souvent dissolvantes » que connaissaient les adolescents, « lorsqu’ils rôdaient de pinte en bar, et de bar en ciné. » A son inauguration, on compta la présence de magistrats, d’éducateurs [ et ] d’universitaires gagnés à cet effort ». 21 Des 16 dito 17 la source ne fait pas figurer le statut professionnel de cette dernière… 18 dito 19 Journal «La Suisse», cité in : Auteur inconnu ; recherche historique DSR ; archives DSR ; 1994 20 Rapport annuel 1926-1927 ; cité in Auteur inconnu ; recherche historique DSR ; archives DSR ; 1994 21 Gesidendorf-Des Gouttes ; Servir ceux qui servent, p. 42 Une action originale A partir du 13 avril 1931, une cantine mobile fut mise en service en ville de Genève, plus précisément sur le réseau de la Compagnie genevoise des tramways électriques ( CGTE ). Le wagon-cantine X 611 était équipé d’une cuisine complète et d’un système de chauf- fage. Il fut géré par un wattman ( conducteur de tramway électrique ). Cette personne était chargée du déplacement du véhicule et de l’accueil des clients. « En compagnie de sa femme 17 , ce tenancier offrait, principalement aux ouvriers qui travaillaient près de la voie, les mets et breuvages traditionnellement à l’honneur dans les restaurants sans alcool et autres foyers du soldat » 18 . Cette mise en service fut approuvée par les représentants des pouvoirs publics comme de l’économie privée. La presse de l’époque porta un regard plus mitigé, voire ironique : « La CGTE va lancer une création dont les destinées – et la destination aussi – relèvent à la fois de l’esprit moral et du régime le plus sec […]. La tempérance est la raison d’être et le but de la cantine […]. » 19 Tant et si bien que le wagon fut baptisé « La Tisane » par la population. Le wagon-cantine suscita également des réticences de la part de quelques tenanciers de la place. L’engin cessa de circuler après quelques années et fut installé de manière fixe au dépôt de la Jonction. «La Tisane » fut remplacée en 1947 par un réfectoire spacieux.
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